Portrait of the artist as a young %@&*!
Le sous-titre fait référence au roman de James Joyce, qui constitue la trame autobiographique de la bande dessinée. Je pense avoir une vague idée de l'adolescence que Spiegelman a passé compte tenu de son histoire familiale:
In 1968 my mother killed herself, she left no note.
Mais au-delà d'une telle déclaration, l'auteur de Maus semble avoir trouvé un relatif chemin vers la guérison en persistant à suivre une carrière artistique. Et la jolie formule suivante permet à la fois de s'en rendre compte, mais aussi d'étriller par la même occasion une certaine frange de la psychologie:
I don’t tend to confuse Art and Therapy (making Art is cheaper) but I did think that Hell Planet helped me « deal » with Anja’s suicide…
L'auteur part du postulat implicite que son lecteur à déjà lu son chef-d’œuvre, récompensé par un prix Pulitzer, ou tout au moins qu'il en a entendu parler. Cela n'empêche pas la lecture de ce "Breakdowns", même si cet ouvrage est censé donner un peu de contexte sur le parcours de Spiegelman. Il est parfois question de pathos juif, de cette angoisse primordiale liée à la survie de l’ethnie, ce qui est tellement explicatif du cheminement de l'auteur. Mais le contexte est toutefois moins large que dans Maus: son auteur prend vraiment comme point de départ le drame familial. Le suicide de sa mère, rapidement couvert dans la première partie mais rappelé dans "Hell Planet" (inclut dans le recueil), a comme conséquence première l'évocation d'une enfance avec le père comme référence principale.
Ballotté entre Stockholm et le quartier de Washington Heights à New York, Spiegelman semble avoir eu une enfance tout à fait normale dans l’Amérique d’après guerre, qui a dopé son économie. Il fait la découverte de la bande dessinée avec le magazine MAD en particulier. Mais il y a probablement une transmission familiale de la névrose qui l’amène à s’intéresser à Freud et la psychanalyse. Les obsessions sexuelles de l’auteur m’ont rappelé Crumb. Je ne suis pas surpris de constater les mêmes insécurités chez ces deux auteurs.
Les strips sont visuellement intéressant, malgré des choix de couleur un peu trop criardes pour moi. À un certain moment, j'ai arrêté de lire le livre pour me concentrer sur les images. Je commençais à me lasser de lire le texte, que je trouvais souvent trop verbeux. La première partie de l'ouvrage se concentre sur la jeunesse et la formation de Spiegelman. La suite est une collection d'histoires courtes. L’auteur de Maus est très lié à la contre-culture, au comics underground. Et Il y a de l'abstraction, des références et influences artistiques dans cet ouvrage paru en 2007, notamment Picasso pour ces visages fragmentés d'inspiration cubiste, mais aussi des rappels aux comics de détective que l'auteur lisait enfant. C'est un pot-pourri d'influences multiples, qui est parfois un peu foutraque, mais qui a néanmoins le mérite d’expliquer le cheminement d’un artiste.