Petit Rouge

Quatre yeux - Sascha Hommer

03/12/2024

TAGS: hommer, bd, autobiographie

Julia, on peut discuter rapidement entre quatre yeux ? (Sascha)

Sascha Hommer commence à fumer des joints à la fin de l'adolescence. C'est le temps des premières découvertes: il croit que Julia est l’amour de sa vie, mais cette histoire n'est pas vraiment réciproque. Un jour il teste le LSD aux alentours du lac de Constance, lors d’une session de camping avec elle. C'est à partir de cet instant que sa consommation de drogue devient plus problématique. L'auteur délivre un récit autobiographique sur sa jeunesse passée à prendre des stupéfiants, essentiellement des psychédéliques, jusqu’à rester un peu perché. Lors d’un trip sous LSD il devient paranoïaque. Il en gardera une séquelle: une porte d'entrée vers la psychose qui se matérialise par la vision d'un chien sans yeux qui l’accompagnera dans la vie, même sobre. Mais il décide de rompre avec cette consommation morbide de toxique en se mettant au sport. Il se ressaisit en reprenant ses études à l'école des beaux arts.

Pourquoi as-tu jeté la came ? (Le chien)

Hommer décrit donc la grosse défonce. Celle qui atteint parfois le point de non retour et rend psychotique. Elle démarre chez l'auteur avec la marijuana, puis des drogues de plus en plus dures, plus fréquemment et en plus grosses quantités. Cela fait froid dans le dos car il ne semble pas y avoir de mal être initial: juste un désœuvrement, un ennui. Au delà du récit personnel, l'auteur décrit une jeunesse désenchantée, quasiment mise à l’abandon: Julia est anorexique, d'autres amis commencent à faire la manche pour s'acheter de la came. Le récit rappelle le Charles Burns de "Black Hole", avec les hallucinations en plus. Hommer réussit très bien à retranscrire le basculement vers l'horreur, qui arrive de manière insidieuse au fur et à mesure des rencontres.

Autant j’ai un peu moins accroché le dessin que dans "Insekt" ou "In China", autant le récit de "Quatre yeux" me parle davantage. Sans être jamais allé aussi loin, je connais les conséquences d’une prise excessive de toxiques, ainsi que leur caractère irréversible sur la psyché. Cet ouvrage de 2009 ne restera pour autant pas dans ma bibliothèque: je trouve l'histoire un peu trop glauque et le trait pas assez original. Reste que j'apprécie Hommer depuis longtemps et je compte continuer à suivre son œuvre dans le futur.