Je crois avoir lu cet ouvrage il y a quelques années maintenant. Mais ne l'ayant jamais chroniqué, je ne savais plus exactement quel en était le contenu. Il me semble qu'il était question des influences secrètes du nazisme. Et en effet, il est très vite évoqué L’Ordre du Nouveau Temple de Lanz comme influence première d'Adolf Hitler. Cet Ordre proposait un pot-pourri de mythologies vouées au culte de Wotan. Est-ce de là que viennent les délires suprémacistes d’Hitler ? Brissaud énumère les influences ésotériques décisives dans la construction intellectuelle d'Hitler.
Il est d'ailleurs évoqué les supposées ascendances juives d’Hitler, que l’on retrouve dans « L’histoire des trois Adolf » de Tezuka. Toujours dans les références pop culture, on retrouve aussi des éléments ayant servi de base à Mike Mignola pour Hellboy, comme l'Ahnenerbe d'Himmler.
Viennent ensuite les Société du Vril et Société de Thulé. Le vril est l’énergie du surhomme. Thulé, capitale de l’Hyperborée, est à l’origine de l’aryanisme. Le compte-rendu que fait Bressaud de ces dérives sectaires fait froid dans le dos. Et le racisme viscéral de ces sociétés secrètes inspirèrent directement l'idéologie d’Hitler.
Jusqu'à sa mort, nous le verrons, Dietrich Eckart sera le grand mentor d'Adolf Hitler. Le futur Führer du III° Reich lui devra beaucoup, à commencer par son « initiation » à la légende de Thulé et le développement de ses facultés médiumniques. Eckart contribuera considérablement à développer chez Hitler cette inébranlable confiance en soi, qui était fondée sur la certitude de posséder les plus importants secrets pour la domination du monde.
Pour Brissaud, le projet nazi va donc au-delà de la dictature:
En 1919, avec Dietrich Eckart, la Société Thulé, sans abandonner son activité magique, va s'orienter vers l'action politique. Elle sera la source vive du national-socialisme qui ne fut pas seulement, répétons-le, un mouvement tendant au succès, à la domination et l'exercice du pouvoir politique, mais aussi, mais surtout, un moyen tactique pour développer la Weltanschauung dans sa totalité humaine; la volonté de puissance politique allant de pair avec la ferme volonté de promouvoir une idéologie capable d'assurer une transmutation humaine décisive, une métamorphose intégralement raciste, biologique, morale, sociale, économique, politique, religieuse et philosophique. Ceux qui écartent cette vérité ne comprendront jamais rien au phénomène nazi.
Hitler monte le SA, tout en maintenant des frictions avec la Société Thulé. Le nationalisme prend de l’ampleur en Allemagne, aggravé par un tribut français qui asphyxie le pays. Brissaud tente alors d’expliquer les raisons de la folie nazie. Il y a un mélange de mysticisme et de philosophie qui se mute finalement en idéologie raciale à un moment dans l’histoire où les peuples constatent leur propre décadence. Pour contrecarrer cette décadence, Rosenberg propose le Mythe du Sang, promu par Hitler. Il s'agit d'une malformation raciste des théories de Darwin. Hitler prépare l’Etat raciste sur cette base idéologique. Il y a une psychopathologie chez ces personnages qui me rappelle plus récemment les délires antisémites d’Alain Soral.
Himmler devient chef des SS. Il recrute Heydrich, "l’archange du mal", pressenti comme le dauphin d’Hitler. Ils déploient main dans la main l’idéologie du nazisme: le Mythe du Sang. Himmler se prenait pour un chevalier teutonique. Il fonde le mystérieux Institut Ahnenerbe (Héritage des ancêtres) en 1935, section scientifique et historique de la SS vouée à l'anthropologie raciale. Théoricien de la Solution Finale, son délire racial vire à l’irrationnel avec le génocide effectif des Juifs, Tziganes et Slaves.
Les SS eux-mêmes n'étaient pas tous initiés aux secrets. Comme dans tout ordre, secte ou société ésotérique, il y avait des degrés dans l'initiation. Ce qui était vrai pour le parti nazi l'était bien davantage pour la SS.
J'ai lu la fin du livre en diagonale, malgré le fait que cette lecture était intéressante, en survolant certaines sections descriptives ou historiques. J'étais davantage intéressé par la première partie de l'ouvrage, dédiée à la construction du nazisme. Avec cet ouvrage remarquablement bien écrit et clair, Brissaud propose une lecture intrigante des origines de l'idéologie nazie.