« Le drapeau noir » de Magritte dépeint un horizon survolé par cinq étranges vaisseaux aériens. Ces derniers sont représentés en vue arrière. Oeuvre visuellement sombre avec une forte teinte de vert, seule la ligne d’horizon semble très faiblement lumineuse. Les cinq aéronefs s’y dirigent.
Peint en 1937, pendant la guerre civile espagnole, ce tableau évoque une menace technologique, un danger venu des airs. Les aéronefs sont sombres, futuristes, aux formes géométriques abstraites, et apportent lentement la pénombre. L’abstraction de ces vaisseaux propose un aperçu d’un progrès technologique qui nous dépasse. La modernité y apparaît incompréhensible, insaisissable.
Pourquoi ce tableau est-il aussi fascinant ? Peut-être par cette critique de la technologie justement. Il semble nous dévoiler sa face sombre. Celle qui porte les bombes allemandes et les déverse sur les populations de Guernica. Il préfigure la guerre à venir. Magritte n’aurait-il pas été plus explicite en ne peignant que quatre aéronefs plutôt que cinq ? Si tel était le cas, la représentation de quatre chevaliers de l’apocalypse issus des airs aurait probablement été trop évidente.
Les vaisseaux sont peints en vue arrière, ce qui est en soi intriguant. Ce choix implique qu’il est déjà trop tard, qu’il n’y a probablement plus rien à faire et que nous voyons dans cette perspective précise un futur inéluctable.
Il semble qu’il existe deux versions de ce tableau. Celle peinte à l’huile de 1937 et une autre, une gouache moins sombre dans sa teinte, datant de 1946. L’abstraction futuriste des vaisseaux du tableau rend cette œuvre encore très actuelle. Sa noirceur ne semble pas avoir été démentie depuis.