Petit Rouge

Ô dingos, ô chateaux ! - Jean-Patrick Manchette & Tardi

04/10/2020

TAGS: tardi, manchette, polar, bd

Je n’avais pas trop accroché « Le petit bleu de la côte ouest » à l’époque. L’intrigue ne m’avait pas convaincue, elle ne me semblait jamais vraiment crédible. Et je l'ai déjà oubliée. Mais c’est Tardi qui dessine alors j’ai donné une petite chance à cette adaptation du roman de 1972, publié sous forme de bande dessinée en 2011.

Julie est une ancienne délinquante qui sort de l’asile. Elle se fait embaucher par Hartog, un architecte friqué, pour s’occuper de son neveu, le petit Peter. Mais elle est rapidement prise au piège du kidnapping du gamin par une bande de malfrats emmenée par le tueur Thompson. Elle s’échappe avec Peter de ses ravisseurs. S’engage alors une course poursuite dans toute la France.

Julie est probablement bipolaire. Accro aux médocs, qu’elle mélange sans vergogne à l’alcool. Elle protège Peter et décide de le sauver des tueurs en série. Encore une fois, c’est un polar. Qui se lit vite et bien. Mais idem, je n’ai pas été particulièrement transcendé par l’intrigue. J’ai beaucoup de mal à imaginer des tueurs en France. Je ne sais pas pourquoi j’ai ce sentiment que ça ne peut arriver qu’aux Etats-Unis. Peut-être est-ce dû à une boulimie de pop culture américaine. Hartog est bien sûr le commanditaire de cette tentative d’assassinat de Peter. Pour le fric évidemment, Peter étant un riche héritier. Julie s’improvise un lien maternel avec le petit, qui en devient moins teigneux. La fin de l’histoire m’a quand même plu. Même si Julie et Peter survivent des malfrats, qui crèvent de manière assez bourrine, elle finit de nouveau à l’asile comme les fous authentiques qui ne trouvent jamais durablement la rédemption.

Je n’ai pas toujours trouvé le dessin abouti. Tardi m’a bien plus impressionné sur d’autres projets. Presque une impression de bâclé sur certaines cases. Il m’a semblé qu’il ne s’était pas particulièrement approprié l’histoire (comme il l’a fait brillamment avec Nestor Burma de Léo Malet). J’ai finalement été un peu déçu par cette bande dessinée, qui ne m’a pas semblée complète, tant par le scénario que le dessin. La préface nous rappelle que Manchette ne connait initialement rien aux polars français. Il est essentiellement féru de cinéma hollywoodien. Et cela se ressent très fortement lors de cette lecture tant la violence est exacerbée et le rythme presque cinématographique. Ce qui rend difficilement crédible la transposition d’une telle intrigue dans un pays comme la France. Contrairement à Léo Malet qui utilise des spécificités sociales et politiques françaises. Avec un contexte historique, un jargon argotique, une certaine idée du crime qui serait plus glauque et réaliste que ce propose le cinéma américain. Manchette est pourtant très marqué à gauche, apparemment. Mais hormis Julie qui est une laissée pour compte de la vie en tant que malade psychique, je ne trouve pas mon compte en ce qui concerne une critique sociale, une mise en perspective historique. Cet ouvrage ne me semble donc pas assez profond pour que je la garde dans ma bibliothèque.