Suite directe de « Marbles » (« Une case en moins » en France), ce manuel de psycho-éducation sur les troubles bipolaires s’adresse exclusivement aux maniaco-dépressifs, et son audience se restreint par là-même. Je ne pense pas que cet ouvrage soit très intéressant pour une personne saine d’esprit, même d’un point de vue purement graphique. Ce n’est pas complètement une bande dessinée, ce manuel est beaucoup plus hybride. « Marbles » était plus introspectif et autobiographique, et pouvait être très instructif pour n’importe qui car il évoquait aussi des aspects subalternes de la maladie comme la créativité. Il rendait compte d’aspects historiques et médicaux qui pouvaient intéresser n’importe qui. Il m’a semblé qu’il était aussi beaucoup plus séquentiel dans sa mise en page.
Ellen Forney assume donc un rôle de pédagogue avec brio. Forte d’un vécu de 20 ans de maladie, 14 ans après son diagnostic de BP-I posé, elle prodigue des conseils d’hygiène de vie, des astuces personnelles, des rappels médicaux, le tout avec une bienveillance incroyable. Ses recommandations ne sont pas directives pour un sou, elles sont sans jugements et n’infantilisent pas le lecteur, ce qui rend l’ouvrage encore plus sympathique. Ce qu’il y a d’agréable avec cet ouvrage tient essentiellement au fait qu’elle nous parle directement, avec beaucoup d’empathie, en rappelant régulièrement les obstacles qui entravent la stabilisation.
Néanmoins, je ne pense pas garder cette bande dessinée hybride. Je la trouve parfois un peu trop légère. De nombreuses pages sont dédiées par exemple à des astuces sur le stockage des médicaments, ce qui m’a semblé être un point de détail sur lequel il m’a semblé ne pas devoir s’appesantir plus que cela. Et même si sa bienveillance rend l’ouvrage très attachant et agréable à lire, je pense avoir déjà beaucoup trop emmagasiné d’informations de psycho-éducation ces dernières années. Malgré le fait que j’avais trouvé « Une case en moins » très intéressant, en particulier par le fait d’aborder la maladie par l’angle de la créativité, je ne l’avais pas gardé pour autant. Je n’accroche pas toujours au dessin et à la mise en page. Je me sens un peu sévère avec son travail, mais il manque quelque chose dans ces deux ouvrages que j’ai du mal à formaliser. « Une case en plus » aurait pu être une somme de connaissance plus globale à mon sens, même si cette bande dessinée s’inscrit dans la continuité et comme complément de « Une case en moins ».