Lecture pénible et laborieuse. Jacques Ellul nous rappelle l’inutilité de se tenir informé, de suivre l’actualité. A l’heure d’Internet c’est d’autant plus vrai.
… l’actualité a pour premier effet non de le rendre plus apte à être citoyen, mais de disperser son attention
Le grand sujet ici, c’est la politique. Elle ne sert plus à rien à l’heure du système technicien. Le désintérêt pour la politique à l’époque du narcissisme étalé sur les réseaux sociaux en atteste.
C’est dans ces termes et par rapport à cet univers d’image que se développe l’illusion politique…
Je me suis plusieurs fois demandé si Ellul ne faisait pas référence à « La Société du spectacle » de Debord quand il décrit l’univers des images. Il évoque aussi un mode de confusion qui n’est pas sans rappeler le « Rapport sur la construction des situations ».
La politique et ses constructions donc, sont à l’origine selon Ellul de l’aliénation de l’homme. Seule échappatoire, l’homme doit réaliser l’utopie de la démocratie, remettre en cause le progrès et retrouver une vertu.
Rappelons pour mémoire que l’homme politique est généralement un incompétent pour les problèmes qu’il a à résoudre. Surtout s’il est devenu (ce qui est obligatoire) un spécialiste de la politique.
Bien que laborieuse, cette lecture a néanmoins achevé de me convaincre.
Le monde politique […] n’est pas celui d’une dictature formelle, qui contraint, écrase l’homme par la violence, la police et les camps. C’est un monde qui séduit, annexe, parle selon la raison, neutralise et conformise, c’est-à-dire attaque l’homme non plus au niveau extérieur de son comportement, mais dans son coeur et sa pensée.
Sorti en 1965, « L’Illusion politique » dresse un tableau pessimiste de la capacité de l’homme à opérer un basculement. Il manquait quoi à Ellul (« l’homme qui avait (presque) tout prédit ») pour se faire entendre ? Sur les concepts il est clair. Sur le langage et peut-être aussi le charisme il a fait avec ses qualités, en tant qu’être humain imparfait lui aussi.